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Elliott Verdier tire le portrait d’un Libéria post guerre civile

Avec le livre Reaching for Dawn, le photographe Elliott Verdier explore le traumatisme collectif qui fut la guerre civile au Libéria entre 1989 et 2003. Rencontre. (Photo d’ouverture : © Elliott Verdier)

Elliott Verdier nous plonge dans l’actualité du Libéria, ravagé par une sanglante guerre civile entre 1989 et 2003 qui a laissé derrière elle désolation et violence. Avec la série et le livre Reaching for Dawn, le photographe tente d’offrir sa vision personnelle de la situation au Libéria, en exorcisant le traumatisme à travers des portraits et des cadres remplis de sensibilité et d’une atmosphère presque irréelle et feutrée. Nous lui avons posé quelques questions autour de ce projet présenté à Circulation(s) 2021.

Peux-tu nous parler de la genèse de ta série Reaching for Dawn ?

Lors d’un premier voyage là-bas, où je ne faisais pas d’image, j’entendais régulièrement « la nuit » revenir dans la parole des Libérien.ne.s. La nuit, dans l’obscurité, seul.e avec ses pensées, le traumatisme semble surgir et devenir palpable. J’ai donc voulu donner corps à cette nuit noire au mutisme étouffant, à travers des images monochromes très denses. Ces n&b sont des paysages ou des images contextuelles essentiellement inhabités, qui plantent le décor de portraits en couleurs. Ces derniers, sensiblement humains, paraissent alors surgir de cette nuit libérienne fantomatique.

© Elliott Verdier
Quel a été ton rapport avec le Libéria ? Pourquoi choisir ce sujet en particulier ?

Je ne me souviens pas vraiment de ce qui m’a poussé à aller au Liberia. J’avais un imaginaire autour de cette région et des conflits qui s’y déroulaient, mais peu de choses sur l’après. Dans mon travail, j’explore des sujets auxquels je suis sensible : la mémoire collective, la transmission générationnelle et la résilience. J’ai su très vite que je serais touché par cette histoire.

Dans cette série tu développes une approche de photojournaliste en sortant de la simple photographie de voyage. Qu’est-ce que la photographie te permet en tant que reporter ?

À vrai dire, je pense au contraire m’extraire du photojournalisme avec ce travail. La photographie de reportage rapporte une action, une histoire, avec une certaine objectivité de ton. Il s’agit de livrer la vérité d’un fait par l’image. Or ici, la photographie suggère à travers la subjectivité de mon regard. La série se compose de simples portraits et paysages, en tentant d’y dévoiler l’indicible. J’aimerais pouvoir dire que ce travail commence là où le photojournalisme s’arrête. Mais les deux sont indispensables.

© Elliott Verdier
Quels rencontres marquantes as-tu fait pendant ce voyage ?

Il y en a eu beaucoup. Beaucoup trop pour que je puisse m’étendre sur le sujet ! Je retiens particulièrement une fin de journée, dans un cimetière abandonné de Monrovia, aujourd’hui investi par d’anciens enfants soldats et d’autres marginaux. Ils ont déblayé les tombes à mains nues pour y dormir, se droguer… J’arrive assez rapidement à cette tombe et trois personnes. Ils acceptent de se faire photographier. Au moment de faire la mise au point, je m’apprête comme souvent à donner quelques directions. Mais là, tout était déjà en place, toute la violence de la situation baignée dans une lumière douce. Personne ne se regarde, chacun semble prisonnier de sa solitude. L’homme en bas continue de se droguer comme si je n’étais pas là. Et cette femme, Grace, enceinte devant cette tombe…Il me semble n’avoir jamais été aussi proche de la désolation.

Quel est ton rapport à la photographie ? Quand as-tu commencé à en faire ?

J’ai débuté la photographie assez jeune, je suis parti réaliser mon premier reportage à 19 ans à la frontière entre la Birmanie et la Thaïlande. J’ai toujours su que je voulais faire ça. Ça a parfois été un problème d’ailleurs, car se confronter à ses rêves de gosse peut être déceptif. J’ai rapidement questionné mon regard et ma position de témoin, c’est ce qui m’a conduit à adopter la chambre photographique et tout ce que ça implique.

© Elliott Verdier
Tes prochains projets ?

J’ai terminé Reaching for Dawn il y a maintenant un an. Avant le festival Circulation(s) et la sortie du livre, je n’avais pas eu l’occasion de partager ce projet car tout s’annulait… et donc l’opportunité de digérer ces photographies, notamment pour passer à autre chose. J’ai ce besoin de clore un travail pour en commencer un autre.

Pour suivre ce photographe :
Instagram
Site

Se procurer le livre sur le site des éditions Dunes.

Source : Elliott Verdier

 


 

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