Léon Herschtritt, éminent représentant de la photographie humaniste, photographe iconique des années 1960, vient de nous quitter en cette fin d’année. Retour sur son parcours exceptionnel. (Photo d’ouverture : Paris, Les Amoureux, Café de Flore, 1960 © Léon Herschtritt)
Léon Herschtritt, représentant du mouvement humaniste en photographie, figure phare des années 1960-1970 en France, nous a quittés. Célèbre pour avoir été le plus jeune photographe à recevoir le prix Niepce en 1960, à l’âge de 24 ans seulement, pour sa série Les Gosses d’Algérie, il a exercé en tant que photographe free lance et correspondant à Paris de l’agence Camera Press Agency.
Par le biais d’amitiés, de rencontres ou de missions aléatoires, le jeune Léon déjeunait tous les dimanches avec Jacques Prévert et ses amis. Il a pu photographier ainsi des personnalités iconiques de cette époque-là, comme Gainsbourg, Sartre, Catherine Deneuve, Jane Fonda…Avec son regard aiguisé, il a documenté Mai 68 et le Paris effervescent de cette décennie.
Ses clichés d’amoureux sont célèbres, témoins de la libération des mœurs ayant eu lieu à la fin des années 1960, pris avec un rare instant de photographe de rue. A travers son objectif il nous a fait découvrir son Paris, qui vivait alors un âge d’or d’agitation intellectuelle et de mondanité, très différent de celui plus sombre et marqué par les inégalités croissantes que l’on connaît aujourd’hui. Une ville lumière où les engagements politiques allaient de pair avec le boom économique de l’après-guerre. C’est avec l’œil du reporter qu’il a su représenter une France en pleine mutation.
Cette même approche entre poésie et reportage, nous la percevons dans ses célèbres photographies du Noël à Berlin en 1961, le premier avec le mur. Entre tragédie et espoir, ces prises de vue ont pour la première fois illustré ce que c’était l’après-guerre en Allemagne, la désolation d’une ville, l’absurdité de ce qu’il s’y déroulait. Tout le talent du photographe résidait alors dans sa capacité à contester, à s’indigner, sans jamais mettre de côté une certaine grâce narrative.
Herschtritt se revendiquait du courant humaniste, un mouvement photographique français qui a réuni des photographes particulièrement sensibles au quotidien et aux expressions les plus spontanées de l’être humain. Ce courant est apparu en 1930 dans les quartiers populaires de Paris et sa banlieue, et a connu un grand essor entre 1945 et 1960. Henri Cartier-Bresson, Robert Doisneau, Willy Ronis sont les trois fondateurs de cette esthétique photographique caractéristique de la scène artistique française du siècle dernier. Herschtritt, avec son réalisme poétique, sublima ce style en y ajoutant une forte éthique politique et sociale, en initiant une certaine approche du photojournalisme.
Dans les années 1970 il ouvre avec sa femme Nicole un café qui devient vite un point de repère pour toute une scène de photographes. Le couple commença ensuite à collectionner d’anciennes photographies et matériel photographique, grâce au voisinage avec les salles de vente aux enchères situées vers le quartier de Drouot. En 1998 il ouvre une galerie à Saint Germain afin de pérenniser plus de cinquante ans de métier de photographe et de passion pour l’histoire de cet art qu’il a contribué à changer en profonfeur.
Source : L’Œil de la Photographie
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