Après s’être assuré que les périphériques produisaient les couleurs voulus, voici la deuxième partie : Travailler numériquement avec les couleurs.
Autrement dit, comment enregistrer de manière informatique, une couleur qui est caractérisé en physique par une distributions spectrale énergétique ?
Niveau : Confirmé / Avancé
La couleur n’est qu’une histoire de perception, et non pas une grandeur physique. Il y a donc plusieurs manière de créer une même couleur, ce phénomène s’appelle le « métamérisme ». Par exemple pour ceux qui ont déjà tiré leurs photos sous lumière rouge, il arrive que des objets aient exactement la même couleur sous la lumière rouge alors qu’ils ont une couleur différente sous la lumière du jour, ceci est du métamérisme.
C’est grâce à ce phénomène physique que fonctionne la synthèse additive, et que vous pouvez ainsi représenter n’importe quel couleur à partir de trois composantes (Rouge, Vert et Bleu).
Ces 4 distributions spectrales sont métamères, soit visuellement de la même couleur.
Espaces colorimétrique et encodage des couleurs :
Nous venons de voir que le métamérisme sauve la peau des photographes, car sans lui pas de reproduction possible des couleurs ou plus simplement : pas de système RGB, CMJN, Lab, etc.
Mais ce n’est pas tout, maintenant que nous savons que chaque couleur peux être recrée par 3 composantes, il faut les choisir avec attention : l’espace colorimétrique !
Et oui, un espace colorimétrique n’est autre que le choix des 3 composantes qui définirons numériquement nos couleurs (attention, ceci n’est vrais que pour les systèmes RVB, donc ce n’est pas valable pour les imprimantes qui ont 4 composantes). La surface d’un espace colorimétrique est appelé « gammut« , elle représente l’étendu des couleurs représentables.
Plus les composantes sont éloignés, plus le gammut est grand et donc plus l’espace peu représenter des couleurs différentes. L’espace ProPhotoRGB va même jusqu’à utiliser des composantes que l’œil humain ne peux pas discerner.
Il paraîtrait donc logique de dire qu’il faut travailler avec un espace colorimétrique qui a le plus grand gammut possible ? Malheureusement non, ça serait beaucoup trop simple, car d’autres paramètres entrent en jeux. En effet plus un espace colorimétrique est grand, plus la précision de l’encodage doit être précise, afin de garder la même qualité de nuances.
Vous n’avez pas très bien compris pourquoi ? voici une métaphore :
Si je vous pose la question « Cet article est-il intéressant ? » les réponses « Oui / Non » serons suffisantes pour y répondre correctement. Par contre si je vous demande « Comment jugeriez vous cet article » vous aurez besoin de bien plus de possibilités pour y répondre avec précision.
Plus le gammut est grand, plus il faut encoder l’image avec une précision importante pour conserver toutes ses nuances.
Il est donc plus intéressant d’avoir un large gammut, afin d’avoir de plus grandes possibilités de couleurs, mais l’encodage de cet espace doit être suffisant pour ne pas perdre en précision.
En pratique : Si vous décidez d’utiliser l’espace ProPhotoRGB pour retoucher vos images, choisissez un encodage sur 16 ou 12 bits. Si par contre votre image sera au final publié sur le web, choisissez sRGB en espace de sortie avec un encodage en 8 bits (obligatoire pour le format JPG).
En pratique 2 : Si votre image est dans un espace à petit gammut (sRGB) inutile de vouloir la convertir dans un espace à gammut plus large. Ceci ne lui donnera pas les couleurs qu’elle aurait pu avoir dans un espace plus grand.
En pratique 3 : Si vous photographiez en format RAW et que vous voulez conserver toute la moëlle de vos couleurs, stockez les en format TIFF dans l’espace ProPhotoRGB codé en 16 bits (cela prend beaucoup de place), pour ensuite les convertir dans un espace plus petit lorsque vous les publierez sur le web.
Attention ! seul l’espace sRGB est correctement reconnu sur le web à l’heure actuel, ne vous risquez pas à les publier dans l’espace AdobeRGB. Sinon elles paraîtrons très pâles..
19 commentaires
Ajouter le vôtreBon en fait j’ai tout simplement fait des tests sur photoshop avec la pipette et il s’avère qu’il n’y a aucune différence en les options perception et relative quand on converti d’un espace plus petit vers un espace plus grand, ce qui semblait logique à 1ère vue 😉
Je viens de finir de lire cet article ô combien intéressant et je me pose une question existentielle : y a-t-il une différence entre les méthodes perceptive et relative de conversion de profils lorsqu’on converti vers un profil plus grand que celui d’origine ?
Merci pour les réponses 🙂
Oh, merci Crapo. 😮
Xuoan : Quand je fais un Save for the web je me retrouve avec un gros manque de dégradé, et des couleurs livides comparé au Save « normal ».
En manipulant pas mal de photos issues du web j’ai remarqué que la plupart des photographes sont largués à ce niveau. La plupart improvise au moment de l’export : soit 0 profil, soit en sRGB, soit pire le profil ICC de leur moniteur ou de l’AdobeRGB, ce qui donne des résultats peu fidèles hors Safari ou Firefox 3 (-> quasi personne dans le monde réel ! ;))
D’où ma question : vous exportez comment vos photos ?
Perso, photoshop, conversion du profil vers un Generic RGB (et non sRGB) puis Save for the web jpg 85 (plus ou moins selon la photo). C’est la seule config qui me permet d’avoir des couleurs équivalentes quelque soit le navigateur, qu’il lise les profils ICC ou non.
Avec un profil ICC sRGB embarqué (soit le réglage d’export standard de lightroom), il y a des différences de couleur assez notables entre un navigateur qui reconnaît les profils ICC et un autre qui ne les lit pas.
(Bon c’est toujours « moins pire » qu’avec de l’AdobeRGB ou du prophotoRGB…)
Aussi un truc important à savoir que j’ai repéré sur Mac. (donc pour les Mac Users uniquement)
Il semble que Firefox (béta 3+) ne lisent pas les profils ICC, tandis que Safari. J’ai une différence impressionnante entre les deux navigateurs sur l’affichage des photos.
Yessss !!! mieux qu’a l’école !
Merci bien pour ces infos complémentaires … ce sont des manip que je fais sans trop y réfléchir et encore moins en connaissant les termes utilisés !
j’suis prêt pour la 3eme partie !
Yop (de retour mais ce coup-ci loggé !) !
moi je veux bien savoir qu’est ce qu’un « profil qu’on inclu dans une photo qu’on exporte » … (commentaire de XRPIX).
Donc dans un monde idéal ou on a de la place pour stocker ses images et une machine puissante pour les traiter, il faut prendre ses photos en RAW, les traiter et les stocker en TIFF/PSD dans l’espace Prophoto et les exporter pour le net en srgb. J’ai bon?
Si oui, une questions dont on a déjà parlé ensemble : il ne faut pas confondre l’espace colorimétrique dans lequel on travaille et le profil qu’on inclu dans une photo qu’on exporte, mais en en détails ça donne quoi?
Plus précisément, ce serait bien de mettre tout ça en application dans un workflow photo concret. J’imagine que c’est en préparation 😉
Petite question concernant « En pratique 3 »:
Qu’est-ce qui impose la limitation de l’espace colorimétrique sur le web ?
A l’heure de la « haute def » sur nos vidéos sur Internet, comment se fait il que l’on soit encore « limité » sur la qualité des images figées …?
M’enfin !?! je viens d’apprendre des choses là !
Merci de penser à faire réviser ceux qui ont des cours sur le sujet…et aussi merci d’en faire profiter ceux qui n’en n’ont jamais eu 🙂
Effectivement, c’est parfois dur savoir ce qu’on veut dès le départ : ce qu’on veut sur l’image, et à quelle utilisation on se destine. Difficile de maîtriser toute la chaîne…
LeCrapo, tu parles ici de retouche d’image, mais le raisonnement-il est le même en amont (je pense au scan de négas) ?
Yep !!! Merci bien pour ces quelques infos !
C’est sûr que c’est rapidement le bordel avec les photos … il faut vraiment réfléchir en amont à ce qu’on veut en faire (web/impression petit format/gd format/archivage/…).
En tout cas, merci bien pour cette petite révision (on oublie rapidement ce qu’on voit en cours !).
tcho !
Si il vous reste des questions en suspend sur le sujet, n’hésitez pas à les poser dans les commentaires =)
Pour la question de SevB : Oui le raisonnement est le même en amont, ainsi qu’en aval.
Il peux paraitre inutile d’utiliser un espace colorimétrique plus grand que celui du scanner (car il sait coder des couleurs que le scanner ne sait pas détecter), mais si on ne fait pas ça, on perdra toutes les couleurs que le scanner peu détecter et que l’espace ne sait pas coder.
On joue toujours avec un compromis entre l’espace colorimétrique de stockage et celui des périphériques.
(idem imprimante et affichage)
La limitation de l’espace colorimétrique sur le web provient des navigateurs que nous utilisons. La plupart ne savent pas interpréter les espaces colorimétriques, et utilisent l’espace sRGB (standard RGB) pour interpréter le codage… sans se poser de question.
Mais tout n’est pas perdu, les navigateurs qui savent lire les espaces colorimétriques arrivent ! Firefox 3 et Safari sont les seuls pour le moment
merci pour ta réponse ! je pense avoir compris (enfin, j’espère !). Y a plus qu’à pratiquer 🙂
Alors pour XRPIX : « Il ne faut pas confondre l’espace colorimétrique dans lequel on travaille et le profil de la photo » ? je crois que tu confonds « espace de travail » et « espace par défaut ».
Car IL FAUT (et tout bon logiciel le fait automatiquement) travailler dans le même espace que celui de la photo ! sinon les couleurs seront mal interprétés.
Par contre l’espace par défaut, est celui qui sera appliqué à toute nouvelle création, ou à une photo qui n’a pas de profil intégré.
Profil de la photo = espace colorimétrique avec lequel la photo a été enregistré
Profil de travail = espace colorimétrique avec lequel les couleurs de la photo seront interprétés
Profil par défaut = espace colorimétrique qui sera utilisé si la photo n’a pas de profil défini.
Petite précision, on peu choisir de travailler dans un autre espace que celui de la photo, mais dans ce cas il faudra convertir la photo au préalable (ou demander au logiciel de le faire automatiquement)
Un « profil qu’on inclu dans une photo » est simplement un espace colorimétrique « simple » (ou matriciel) qu’on inclus dans les données d’en-tête d’une image, afin de s’assurer qu’elle sera correctement interprété par les logiciels.
C’est justement cette donnée qui n’est pas utilisé à l’heure actuel par la majorité des navigateurs web.
Alors petit précision, il ne faut pas confondre profils ICC et espaces colorimétriques. Ils sont proche, mais n’ont pas le même but : le profil ICC décrit le comportement d’un périphérique, dans le but de corriger sont comportement « déviant »… alors que l’espace colorimétrique décrit la manière de coder tel ou tel couleur.
Firefox 3 béta 4 gère bien les profils colorimétriques intégrés aux images, mais pas par défaut !
Il faut modifier le paramètre suivant :
taper « about:config » dans la barre d’adresse, et modifier le paramètre « gfx.color_management.enabled » à « true »
Pour tester si votre navigateur prend en charge les profils colorimétriques :
http://www.gballard.net/psd/go_live_page_profile/embeddedJPEGprofiles.html
Alors avant une récente update de photoshop, il fallait bien que je fasse un « Convert to Profile » > Generic RGB, avant le Save for the web, sinon les couleurs étaient à l’ouest avec cet export. Depuis quelques temps je n’ai plus à passer par cette étape (mais je désactive « convert to sRGB » dans le panneau d’export save for the web).
Pouah.