Leica est une marque emblématique et spéciale dans le monde de la photo et du luxe : Chaque nouvel appareil est synonyme d’exclusivité, de raffinement, de qualité et de débats. Et lorsque la marque au point rouge annonce un appareil photo exclusivement numérique noir et blanc, ça ne laisse personne indifférent. Nos testeurs ont pu passer quelques jours avec ce M-Monochrom et vous font part de leurs impressions dans ce double test !
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Peu de marques qui inspirent le désir et l’envie comme Leica. Figure emblématique de la photographie argentique, la firme allemande s’est lancée dans les appareils télémétriques numériques de luxe ; d’abord le M8 avec un « petit » capteur APS-C en 2006, puis le M9 trois ans plus tard avec un capteur plein format suivi de quelques versions toujours plus exclusives comme le M9-P ou la série spéciale Hermes.
En avril 2012, Leica a stupéfait la communauté de photographe en annonçant le M-Monochrom : un appareil photo numérique … noir et blanc uniquement ! Pari osé, aberration ou coup de génie ? Pour le savoir, Leica nous a prêté son dernier bijou pendant quelques jours, accompagné par le dernier 35mm f/2 de la maison.
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Ergonomie
Boitier métallique et laiton, finition cuir, bords arrondies et viseur télémétrique à gauche, pas de doute, il s’agit bien d’un Leica M. L’ergonomie qui n’a pas changé avec les années se montre presque irréprochable. Mieux encore, elle a très bien pris le virage du numérique. Atout de la marque, la finition est exemplaire. L’appareil est assez léger mais garde un encombrement assez conséquent, un peu supérieur à celui du Fuji X-Pro 1.
La prise en main est correcte. A savoir qu’un grip peut être rajouté afin d’améliorer la préhension. Du reste, les commandes tombent bien sous les doigts, que ce soit le barillet de vitesse, la roue codeuse ou encore la bague d’ouverture ou de focus sur l’objectif. On ne change pas une équipe qui gagne depuis des décennies. Les aficionados seront aux anges, les amateurs d’appareils « modernes », un peu perdus face à tant de dépouillement.
Petit tour du propriétaire. La façade se distingue par sa simplicité : le viseur, la fenêtre d’éclairage des cadres lumineux et la commande de sélection des cadres dans le viseur.
Sur le dessus, le déclencheur surplombe le bouton on/off. Ce dernier permet aussi de sélectionner le mode simple, continu ou retardateur. Le barillet de vitesses se trouve entre le déclencheur et le grip pour le flash. Le bruit du rideau n’est pas sans rappeler les mécanismes des appareils argentiques. Et cela joue beaucoup dans l’expérience de prise de vue.
Même simplicité au dos. On retrouve une roue codeuse et des boutons directionnels pour la sélection. En revanche, pas de boutons de validation au centre ! Celui si se trouve à gauche de l’écran, avec les réglages d’ISO, les infos, la lecture et la suppression d’image. Les choix des boutons et de leur disposition sont donc discutables, sans pour autant être vraiment gênant.
Les menus sont simples et clairs, ce qui ne surprend pas vu les fonctionnalités réduites de l’appareil. L’écran quant à lui est… Scandaleux. Avec 250.000 points et des angles de vue limités c’est moins bon que n’importe quel appareil compact sur le marché ! Nous avons noté une latence lors de la lecture des images et dans les zooms, ce qui ne devrait pas être toléré de nos jours, encore moins pour un appareil de cette gamme et de ce tarif.
Le Leica M-Monochrom accepte des cartes SD dont le slot se trouve dans le sabot, de même que la batterie. Ici encore, gros clin d’oeil aux anciens « M » puisque le principe du socle qui se dévisse et s’enlève a été repris des argentiques. C’est folklorique, mais pas forcément super pratique.
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Visée télémétrique
Le Leica M-Monochrom, comme tous les appareil de la gamme M, possède une visée télémétrique. Celle-ci présente l’avantage de pouvoir effectuer une mise au point manuel très rapidement. Le focus se fait en alignant deux images au centre du viseur en manipulant la bague sur l’objectif. En comparaison, ce mode de mise au point est aussi rapide et simple à utiliser que le focus peaking que l’on retrouve chez Sony. Certes, il n’y a pas d’AF sur le M-Monochrom, mais ce n’est pas vraiment pas dérangeant tant le télémètre est pratique. Et pour la photo de rue ? On peut toujours utiliser l’hyperfocale et la profondeur de champ indiquées sur l’objectif.
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L’image
Depuis son annonce, le Leica M-Monochrom aura fait couler beaucoup d’encre. L’arrivée du numérique a offert aux photographes la possibilité de prendre des photos en couleurs aussi bien qu’en noir et blanc. Avantage considérable par rapport à l’argentique où il faut d’abord finir la pellicule avant d’en changer. Du coup, proposer un appareil qui ne fait que du noir et blanc, ça semble rétrograde.
La photo argentique conserve un avantage sur le numérique : la plage dynamique. C’est le nombre de niveau de gris enregistré par le capteur ou le film. La plage dynamique d’un film argentique est bien plus grande qu’en numérique et apporte cette douceur que l’on retrouve dans ces photos. C’est sur ce terrain que vient jouer le Monochrom, dont la promesse était de s’approcher du noir et blanc plus proche de l’argentique. Et il s’en sort très bien.
La lumière est très douce et capture beaucoup de détails dans toute la plage dynamique. C’est très avantageux sur les portraits. L’objectif apporte beaucoup aussi à la qualité d’image et aux détails. La mesure d’exposition est correcte et assure dans toutes les situations. Et finalement, le noir et blanc n’est plus une contrainte, mais devient un avantage. Pas besoin de réfléchir à la balance des blancs ou au style d’image. Une fois que l’ouverture est réglée (ou la vitesse), il suffit de se concentrer sur le cadrage.
Au final chaque photo est une réussite. Le plaisir de shooter est incroyable. On retrouve la délicatesse de la lumière en argentique avec la sensibilité du numérique et le rendu instantané de la prise de vue. C’est simple, nous n’avions pas pris autant de plaisir à faire des photos depuis longtemps !
Pour reparler performances, la sensibilité du capteur est exemplaire. L’image conserve beaucoup de détails et le grain est très fin.
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M6, M9 ou M-M ? L’avis de Xavier
Et par rapport à d’autres Leica ? Nous avons confié le M-Monochrom, à Xavier, notre spécialiste de la marque et fan d’argentique, qui possède un M6 (argentique) et un M9 (numérique). Voici ses impressions :
Utilisateur de Leica argentiques et numériques, j’étais impatient d’essayer le nouveau Monochrom. De prime abord, impossible d’être perdu : La prise en main est identique, on ressent un grand plaisir à déclencher, les réglages d’ouverture et de vitesse sont toujours aussi accessibles. A part une sobriété accrue, le Monochrom est un boîtier Leica M digne de ce nom.
Pratiquant le noir et blanc en argentiques sur un Lecia M6, il m’est arrivé de comparer le rendu entre la pellicule et des fichiers de Leica M9 convertis en noir et blanc. La pellicule à toujours emporté ma préférence, le rendu étant beaucoup plus organique. Mais le niveau de détail fait souvent la différence.
Mon but était de prendre plusieurs scènes types avec le m9 et le monochrome, dans les conditions identiques avec les mêmes réglages. Les deux boîtiers sont équipés d’un 35 Leica qui ouvrent à f/2 au maximum.
La première partie du test a consisté en une petite balade dans le centre de Paris par une journée très ensoleillée. Les résultats sont très bons et ce qui est étonnant c’est qu’il y a peu (voir quasiment pas) de différences entre le fichier du M-Monochrom et le fichier du M9 converti en noir et blanc. Je vous laisse en juger :
Là où le M-Monochrom brille, c’est lorsque l’on monte en sensibilité, comme l’a montré Jerka. Le M9 se trouve dépassé à haute sensibilité et le fichier converti en noir et blanc est bien moins propre que celui du Monochrom.
En bref, c’est un appareil génial à utiliser. En revanche, même si je fais 90 % de noir et blanc, je ne pourrais pas envisager de me passer complètement de la possibilité de faire de la couleur. Possesseur de deux Leica, je fais partie du public visé par le Monochrom, mais le prix exorbitant m’a complètement découragé et en fait un produit vraiment élitiste.
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Conclusion
Au final, le Leica M-Monochrom est un original. En jouant sur une ergonomie simpliste voire rudimentaire, il permet de se concentrer sur la photo et « l’instant décisif« . Son capteur noir et blanc tient ses promesses et offre des images d’une très belle qualité, tant en termes de détails qu’en terme de lumière. Le plaisir est assuré, tant qu’il ne faut pas sortir la carte bleue.
Car nous avons bien sûr à faire à un appareil haut de gamme, voire de luxe, qui vise une clientèle exclusive : A 6800€ le boitier nu, autant dire que vous n’en verrez pas à tous les coins de rues. Nous continuerons de rêver d’appareils numériques noir et blanc plus accessibles pour nos bourses. Et puis, qui sait ? Dans quelques années, les capteurs numériques couleurs atteindront certainement une plage dynamique similaire.
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A retenir
+ Sensibilité
+ Finition
+ Qualité d’image du capteur 18Mpx
+ Visée télémétrique
– Tarif prohibitif
– Ecran dépassé depuis 2002
– Disposition des boutons discutable
– Pas d’autofocus
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A voir
+ La galerie de Xavier avec le M-Monochrom
+ Le site de Leica
+ L’article de lens sur le fonctionnement des télémètres
+ La page wiki du Leica M-Monochrom
+ Un face-à-face avec l’argentique
25 commentaires
Ajouter le vôtreIl faut avoir envie de faire du mal aux mouches et surtout d’aimer les images grises.
« il y a peu (voir quasiment pas) de différences entre le fichier du M-Monochrom et le fichier du M9 converti en noir et blanc »
Étonnant que la phrase la plus importante du test soit noyée dans une description qui nous détaille à ce point l’emplacement de chaque bouton de l’appareil.
Bref, aucune différence entre le M9 et le M9-M question qualité, hormis qu’ils ont amélioré la gestion du bruit… Y’a de quoi être franchement sceptique…
Une fois en rentrant chez moi j’ai vus un touriste faire des photos de sa famille avec un M9 au pieds du sacré coeurs.. j’ai fondu en larme.. 😀
Si j’ai bien compris, pas de différence avec le M9 couleur niveau qualité du N&B sauf sur les hauts ISO? L’intérêt de la version monochrom se trouve bien limité pour le coup je trouve…
Ah tiens, on met à jour l’article suite aux commentaires, mais on ne publie pas le commentaires ???…
Pour mes 40 ans, si je négocie bien le truc… plus que 9 mois !
Je veux, je veux, je veux !!!
(moi qui ne voudrait faire que du N/B)
Cool ton test Xavier ! Pressé d’échanger en vrai avec toi sur le sujet ! En tout cas c’est sur que c’est un appareil élitiste ! Pas pour moi !
Ah non, pas de cellule sur l’avant des boitiers. Comme tous les M depuis le M6, il est TTL, la cellule est donc à l’intérieur du boitier. Les trois fenêtres que l’on voit à l’avant sont le viseur, à l’extrémité droite le télémètre et au centre un dépoli servant à éclairer les cadres dans le viseur. Dommage de faire un article sur un télémètre et de ne pas bien en expliquer le fonctionnement…
Si ça peut faire réduire la taille de la file d’attente chez Négatif+ remplie de hipsters venant avec leur peloches N&B alors je suis je valide !
Plus sérieusement je trouve tout de même que c’est bien cher payé pour un appareil tellement exclusif.
Au salon de l’automobile, il y’a une masse de gens qui font la queue juste pour pauser leurs fesses dans une lamborghini. Moi je fais pareil au salon de la photo dans le stand Leica 😀
J’envie ceux qui ont la chance (et les moyens aussi) d’en posseder un.
C’est vraiment le sentiment que j’ai eu : tester un appareil d’exception comme on testerait une Ferrari.
Merci Alexandre, on a modifié selon ton commentaire pour éviter la confusion, mais il y a bien une cellule en façade qui permet de mesurer la luminosité ambiante et évaluer la balance des blancs. C’est le petit rond qu’on voit entre la fenêtre gauche du télémètre et sa vis de réglage.
Merci en tous cas pour le conseil, on ajoutera un lien pour expliquer le fonctionnement d’un télémètre!
C’est vraiment lorsquon monte en sensibilité que le monochrom brille, j’aimerais l’avoir une semaine complète pour voir comment il se débrouille en soirées 😉
Je rêve du capteur et du traitement de signal d’un d4 dans un futur M…
Tant que tu y est, fous-y un capteur de D800 :p
Moi s’il me pondaient un 5D III dégraissé et plus compact ça m’irai aussi bien…
Justement, la différence est impressionnante dès qu’on monte en sensibilité!
Sauf qu’à priori, la particularité mise en avant est de faire du n&b… si le rendu n’a rien de différent c’est quand même d’abord d’importance et ensuite consternant….
Quand à la gestion du bruit, j’espère bien qu’en 4 ans ils ont réussi à faire mieux que le M9 original qui il faut le dire est une sacrée bouse sur ce plan.
Ce problème de haute sensibilité est dû au type de capteur, ils ne vont pas pouvoir faire beaucoup mieux sans en changer la technologie. Et beaucoup apprécient le CCD face aux CMOS, encore à ce jour.
Personnellement je suis beaucoup plus rebuté sur la qualité (de merde) de l’écran arrière, pour lequel on a des solutions. C’est pas que je regarde souvent l’écran, mais quand tu regardes et que t’arrives même pas à voir si la mise au point est bonne c’est couillon…
Désolé d’insister, mais il y a bien une cellule à l’extérieur des m8,m9 et m9m (en plus de celle dans la chambre). C’est le petit rond vitré que tu peux voir en façade. Il est situé au coin dans le renfoncement du haut du boîtier, au niveau de la molette des vitesses.
Pour le fonctionnement d’un télémètre, on avait déjà fait un article vers lequel j’ai rajouté un lien en suivant ton conseil.
Xavier: Ce n’est pas une cellule à proprement parler, c’est pour mesurer la balance des blancs.
Non pas uniquement pour mesurer les blancs! Elle sert aussi à mesurer la luminosité ambiante et permet en effectuant une soustraction avec la mesure de la cellule principale, d’inscrire dans les donnes exif une estimation de l’ouverture de l’ouverture pendant l’exposition (il n’y a pas de couplage de la vague d’ouverture avec le boîtier).
On va arrêter avec cette histoire de cellule, si vous ne nous croyez pas, renseignez vous, allez voir les articles qu’on a ajouté en lien et venez nous poser des questions pertinentes!
Merci 😉
Pour éviter la queue suffit d’aller dans un vrai labo.
Désolée mais je trouve ton commentaire extrêmement condescendant. Ce touriste a bien le droit de vouloir faire des belles photos de sa famille. Et puis peut-être qu’il a fait de magnifiques photos de Paris et que celle-là était une incontournable…