Pierre-Elie de Pibrac, David Prichard et Katya Ilina sont les shortlistés pour le quatorzième Taylor Wessing Photographic Portrait Prize. Entre body positive, résilience face à l’adversité et lutte pour l’émancipation, les trois sélectionnés déploient en plusieurs langages photographiques un puissant élan de vie. (Photo d’ouverture : David par Katya Ilina © Katya Ilina. )
Le prestigieux prix Taylor Wessing Photographic Portrait Prize a dévoilé ses trois shortlistés 2021. Organisé par la National Portraits Gallery de Londres, le prix permet à certains des noms les plus intéressants de la photographie émergente de s’exprimer à travers la pratique du portrait. Pierre-Elie de Pibrac, David Prichard et Katya Ilina ont été sélectionnés parmi 2215 photographes à travers le monde ayant soumis plus de 5000 photographies.
Avec son portrait de David (photo d’ouverture, ndlr), Katya Ilina se confronte à l’un des messages les plus urgents dans un monde où l’image numérique conditionne au plus haut point notre estime de nous et notre rapport au monde : le body positive. En s’attaquant à la grossophobie, elle questionne aussi les frontières du genre. Elle choisit alors de faire poser des hommes comme traditionnellement l’iconographie occidentale ferait poser des femmes.
« De Velázquez à Ingres, les peintres ont représenté des hommes en position de pouvoir ou en héros musclés au combat, tandis que les femmes sont souvent représentées nues et allongées, communiquant la douceur, la faiblesse et l’ouverture au regard », explique Ilina. « Je voulais emprunter le langage corporel dit féminin de ces peintures et le juxtaposer à des modèles masculins. La force physique et émotionnelle domine toujours les idéologies occidentales et les attentes à l’égard des « vrais hommes », mais il est important que les hommes contemporains aient le droit d’être vulnérables et doux, et de ne pas en avoir honte. »
Pierre-Elie de Pibrac, quant à lui, a passé huit mois au Japon avec sa famille dans les régions les plus touchées par les accidents et attaques nucléaires afin de saisir la résilience de celles et ceux qui ont subi ces catastrophes sur leur peau. Le titre de la série, Hakanai Sonzai, se traduit par « Moi-même je me sens comme une créature éphémère ».
« Chaque portrait émane de longues discussions que j’ai eues avec mes sujets sur un événement douloureux de leur vie », explique-t-il. « Dans toutes les photos, j’interdis tout mouvement, comme s’ils étaient piégés par leur environnement, sans échappatoire visible. »
Pour finir, le troisième shortlisté du quatorzième Taylor Wessing Photographic Portrait Prize est le photographe australien David Prichard, qui a immortalisé la vie des femmes aborigènes gardiennes de bétail dans le Queensland du Nord. Ces femmes mène une vie scandée par l’effort physique, partagées entre plusieurs rôles, de la cuisine aux autres tâches ménagères et le contrôle du bétail, souvent effectué à cheval. L’histoire de ces femmes est presque inconnue et le photographe souhaite avec cette série leur donner une voix.
« Toute enquête sur l’histoire de l’Australie révèle les années de traumatismes subis par les populations indigènes », dit Prichard. « On ne peut qu’imaginer ce que les femmes gardiennes de bétail ont enduré, vivant dans des régions reculées, dans un monde dominé par la culture et la loi coloniales blanches. Je voulais produire des portraits dignes, forts et beaux, qui puissent représenter ces femmes aujourd’hui et à l’avenir. »
Le gagnant sera annoncé le 9 novembre. Une exposition des finalistes du Taylor Wessing Photographic Portrait Prize sera organisée en janvier 2022 à la National Portrait Gallery.
Source : www.npg.org.uk
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