Du 17 juin au 14 août, une exceptionnelle rétrospective est dédiée à Mary Ellen Mark à la Maison de la Photographie Robert Doisneau. Le public pourra découvrir The lives of women, série culte de la photographe qui a su immortaliser des vies de femmes au plus près de la réalité de l’American way of life. (Photo d’ouverture : Amanda et sa cousine Amy, Valdese, Caroline du Nord, États-Unis, 1990 © Mary Ellen Mark)
Devenues des icônes de notre culture visuelle, les images de Mary Ellen Mark font partie de l’Histoire. Photographe emblématique, elle a immortalisé le style de vie américain avec une justesse imparable, en représentant le réel avec une sincérité désarmante, remplie d’humour, sensibilité, intensité. La photographe appartient à cette famille d’artistes qui se mesure à la réalité du monde et qui interroge les marges de nos sociétés où se cache le regard des prostituées, des droguées et des laissées-pour-compte. Son cliché de la petite fille à la cigarette (en ouverture de cet article, ndlr) reste l’un des plus révélateurs de son approche photographique, en pointant l’objectif sur une certaine Amérique white trash.
L’exposition présente des images sélectionnées par la photographe au début des années 2000 alors qu’elle mettait de l’ordre dans ses archives : elles disent cet engagement qui fût le sien à travers la figure qui traverse l’œuvre entière de la photographe, celle de la femme dont elle s’était faite porte-parole. L’une des photographes les plus singulières du XXème siècle, elle a habitués les spectateurs à faire face au monde sans détourner le regard. Comme Eugène Atget se penchait sur les zoniers des faubourgs de Paris et les vagabonds du Port-Royal au tournant du siècle, la photographe se penche sur celles et ceux qui du fait de leur marginalisation ne font plus partie de la hiérarchie sociale.
« L’infâme est celui que l’on ne regarde pas. Il n’est qu’une ombre transparente qui hante les souterrains du monde comme les condamnés à mort de la société » explique Anne Morine, la commissaire. A travers son objectif, elle illustre le visage caché de l’Amérique, son côté le plus monstrueux. Elle se faufile alors dans le regard des prostituées, des toxicomanes, des personnes marginalisées par leur identité de genre, sans oublier les dangereux fanatiques du Ku-Klux-Klan et les néo-nazis. Les femmes sont les héroïnes de ces récits, qu’elles subissent la réalité ou qu’elles la façonnent.
« Ward 81 », « Indian Circus », « Streetwise », « la Famille Damn», « Twins » : ces photographies nous plongent dans cette carrière fulgurante, exemplaire et surtout dans cet engagement irrévocable en faveur des femmes. Comme le souligne la commissaire, dans cette sélection photographique, l’artiste « laisse ici un témoignage poignant sur l’Histoire de l’Humanité, un document qui parle d’un passé auquel il convient de mettre un terme ».
The Lives of Women rassemble des photographies, des films et du matériel pour explorer le travail que Mark a réalisé au cours de la seconde moitié du 20e siècle en documentant une grande variété de femmes dans diverses situations.
Son travail précède le mouvement #metoo, la prise de conscience autour des abus et des souffrances endurées par les femmes, avec de nombreux projets explorant en profondeur la vie de personnes dans des situations difficiles, douloureuses, parfois presque impossibles. Tel une témoin passionnée, la photographe s’est servie de la caméra pour plonger profondément dans la vie des autres comme un moyen d’embrasser leur humanité et de la partager avec un public plus large, offrant à ses sujets une voix significative, souvent puissante.
Mary Ellen Mark, lives of women. Du 17 juin au 14 août, Maison Robert Doisneau, Gentilly.
Source : Maison Doisneau
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