L’exposition-festival Prix Utopi·e, premier prix LGBTQIA +, qui s’est tenu à Paris fin mai, à dévoilé au grand public deux noms de photographes à suivre de près Nanténé Traoré et Damien Rouxel. Les deux, célèbrent avec puissance et une rare sensibilité les identités queer. (Photo d’ouverture : Tu vas pas muter – © Nanténé Traoré)
Le Prix Utopi·e clôture sa première édition : le festival veut mettre en avant des artistes émergents LGBTQIA +, toute discipline confondue, et leur offrir la possibilité de gagner une bourse pour leur travail. Le prix avait sélectionné dix artistes sur plus de 250 dossiers de candidature envoyés. Parmi ceux ci, deux photographes ont retenu notre attention : Nanténé Traoré et Damien Rouxel. Le premier, avec sa série Tu vas pas muter, met en scène les moments de partage, de soin et de douceur qui accompagnent la prise de la testostérone au sein des communautés trans. Le deuxième, raconte la trajectoire d’un artiste queer issu d’un milieu rural en faisant dialoguer son univers avec celui de ses parents agriculteurs.
Portraits intimes emplis de douceur par Nanténé Traoré
Auteur du livre La nuit t’arrache à moi, Nanténé Traoré côtoie la poésie par les mots et par les images. Dans ce texte bouleversant, lu lors du festival, il raconte la perte de l’être aimé après une overdose. Le deuil est exprimé avec une douceur désarmante, la même que nous retrouvons dans ses clichés, et notamment dans la série Tu vas pas muter. Ces délicates photographies immortalisent les moments de prise de testostérone de personnes en transition. Le photographe souhaitait rendre visibles ces corps, ces instants riches de douceur et de protection mutuelle, d’amitié et de sourires. Comme l’indique l’artiste, le titre de la série vient de son père qui, pour rassurer Nanténé lors de sa transition, s’était exclamé « mais t’inquiète pas, tu vas pas muter ! ».
Le monde rural rencontre la culture queer dans les photos de Damien Rouxel
Damien Rouxel est fils d’agriculteurs. Il a grandi à la ferme et connaît les codes, le langage et les outils du monde paysan. Dans sa série présentée au Prix Utopi·e, il fait rencontrer sa culture queer avec le monde quotidien de ses parents. Par une réappropriation et réinterprétation des codes de la ferme, Damien Rouxel façonne « un terrain de jeu où les animaux, ses parents et sa sœur, les machines, les outils et tout ce qui constitue l’environnement de travail deviennent le décor et les acteur.trice.s de ses mises en scène », comme l’indique Julie Crenn. En abordant frontalement la question de l’homophobie et de l’agribashing, Damien Rouxel s’interroge inlassablement sur l’altérité, sur les marginalisés, et sur ce que la rencontre entre des cultures minorisées peut produire.
Avec le Prix Utopi·e, Agathe Pinet et Myriama Idir entendent visibiliser de plus en plus les pratiques artistiques queer, encore trop souvent invisibilisées et méprisées par le monde de l’art. Le prix, ainsi que ses partenaires et son jury, partagent cette envie de lutter pour une plus grande égalité dans les disciplines artistiques et que le génie queer puisse rayonner à sa juste valeur, dans un monde qui en a urgemment besoin.
Source : Prix Utopi·e
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