Avec son exposition FASHION le photographe Paul Kooiker tourne en ridicule l’industrie de la beauté, sa rapidité et sa superficialité. Ses clichés hors norme dézinguent nos canons de beauté et nous renvoient à nos fantasmes les plus enfuis. Jusqu’au 12 février chez FOAM à Amsterdam. (Photo d’ouverture : © Paul Kooiker)
Photographe de mode, Paul Kooiker est à la fois un insider et un outsider du système. Alors que les grandes maisons s’arrachent l’artiste néerlandais, lui, il s’attaque à démolir l’industrie de la beauté et ses absurdités par des clichés flirtant avec le surréalisme. Dans l’exposition FASHION, présentée chez FOAM à Amsterdam jusqu’au 12 février, il délivre ses images prises au smartphone, qui détournent la fonction narcissique de cet instrument consumériste. En effet, l’identité des individus et leur beauté supposée sont effacés au profit d’une sensualité brute, honnête, frontale, presque freudienne, nous renvoyant à des désirs impudiques.
Une photographie expérimentale intemporelle
C’est que Paul Kooiker s’en fiche des conventions du huitième art. Loin d’être un bon élève, il s’adonne à une expérimentation photographique qui le rend iconoclaste. En se servant du smartphone, outil privilégié d’une société qui utilise la photo dans un but narcissique, il immortalise des corps privés de leur identité, affichant fièrement leur réalité. Alors que le mot « fashion » désigne quelque chose qui est en vogue à un instant T, les photographies de Kooiker pourraient dater de n’importe quelle époque, se situant hors du temps. Elles appartiennent à une zone de notre esprit liées aux éternels tabous, aux injonctions physiques qui nous entravent, à la soif d’expression sincère de nos désirs.
Influencé par les surréalistes, il en conserve toute la force expérimentale et la charge psychologique, pour un érotisme troublant et sans frontières. Il crée une sorte de beauté à la puissance non maîtrisable, qui n’est pas superficielle, mais presque freudienne dans sa façon de jouer sur les désirs obscurs, les fétichismes et les rêves subconscients. Sa photographie transcende les rôles classiques du genre : ses modèles adoptent des poses inhabituelles et leurs visages sont souvent laissés hors du cadre, ce qui masque leur identité.
L’iPhone, effet miroir de notre narcissisme
Toutes les œuvres de l’exposition sont créées avec un iPhone. À une époque où tout le monde photographie avec son smartphone, Kooiker utilise précisément cet outil pour créer un monde parallèle qui en est apparemment détaché et qui ne peut être copié. Son exposition, FASHION, rassemble une grande variété d’images issues de ses commandes de mode pour créer une installation globale qui fonctionne un peu comme une galerie des glaces : elle fige la vitesse vertigineuse de l’industrie de la mode et révèle l’absurdité de la vanité et du désir humains. Le smartphone, symbole même d’une société narcissique qui enferme la beauté dans des normes oppressives, est détourné de son but vaniteux pour devenir un moyen d’émancipation.
Avec son style imprévisible et sans filtres, Kooiker nous confronte à nous-mêmes, à nos conceptions archaïques et figées de la beauté, aux millions de possibilités qui s’offrent à nos désirs.
FASHION est une exposition de la galerie FOAM, ouverte jusqu’au 12 février à Amsterdam.
Source : FOAM
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