Le Jeu de Paume rend hommage à Peter Hujar, photographe pionnier de la représentation de la culture gay et underground. Jusqu’au 19 janvier 2020. (Photo d’ouverture : Nu incliné sur un canapé, 1978 © Peter Hujar)
La culture queer entre révolte et romance
Jusqu’au 19 janvier 2020, le Jeu de Paume consacre une exposition au photographe Peter Hujar. Insaisissable, muable, son univers est marqué par l’urbanité, son rapport avec New York et les lieux délabrés, inconnus, cachés qui fuient à l’oeil du passant et qui ont accueilli des familles de « marginaux », ces personnes queer ne pouvant souvent pas s’afficher au grand jour. C’est un monde sombre mais féerique et rempli de grâce que Hujar prend en photo, en sublimant ses sujets et en les transformant d’humains isolés à créatures rarissimes et mystérieuses.
Allongés, voluptueux ou rêveurs, ces hommes, femmes et transgenres expriment tantôt une mélancolie douce tantôt lancent une provocation. On passe alors d’un langage plus contemplatif, comme dans le portrait de l’écrivaine Susan Sontag, à une mise en scène plus dramatique, comme dans ce superbe portrait de l’icône transgenre Candy Darling; on se balade entre un torse masculin nu presque insolent, à un cliché pris de dos, plus méditatif, intimiste, tendre.
Le contexte historique des émeutes de Stonewall et de l’épidémie du SIDA
Hujar évoluait au sein d’une scène avant-gardiste faite de danseurs, de musiciens, de plasticiens et de travestis. Son accomplissement en tant que photographe fut contemporain de l’évolution et de la visibilité du mode de vie gay entre 1969 — date des émeutes de Stonewall — et la crise du sida dans les années 1980. Une époque cruciale pour la visibilisation des luttes et des cultures queer, qui a mené notamment aux questionnements autour des espaces safe pour tous, à la prise en compte de la santé des personnes queer dans l’agenda politique, à une nouvelle vague féministe.
Dans son studio, il a collecté des photographies dont il disait : « ces sont des images simples et directes de sujets difficiles et compliqués ». Ainsi, l’exposition suit le parcours de ce photographe depuis les années 1950 aux 1980, décennie pendant laquelle il s’affirme en tant que figure centrale du mouvement LGBTQI+ à l’instar de son contemporain Robert Mapplethorpe.
En 1981, Hujar a une brève liaison avec le jeune artiste David Wojnarowicz, avec qui il parcourt les quartiers délabrés de New York. La ville qu’il a photographié à cette période, est un petit monde vibrant d’une intense énergie créatrice, qui a depuis disparu. Peter Hujar meurt en novembre 1987 d’une pneumonie liée au sida.
Cette exposition, Speed of Life, lui rend hommage à une époque pas anodine, au début d’une décennie, les années 2020, qui promet d’être tout aussi cruciale pour l’affirmation des droits et des libertés des personnes LGBTQI+.
Source : Jeu de Paume
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