Polaroid, Technicolor, Kodak : Autrefois piliers du monde de la photographie, aujourd’hui dinosaures de ce dernier qui a largement changé. Crise identitaire, mauvais choix, rachats et licenciements, les légendaires marques luttent pour exister, voire survivre chacune à leurs manières.
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Polaroid : l’entreprise victime de son image de marque
Polaroid fête ses 75 ans cette année, et cela se ressent : L’image du leader innovant des années 80 semble désormais très lointaine.
Le stand du CES 2013 avait ainsi des allures de musée vintage, difficile de retenir un long et déprimant soupir. Comme le dernier appareil annoncé par la marque (le porte-nom ?), l’iM1836, un hybride tournant sous Android, intéressant sur certains points, mais qui est loin de convaincre : les premiers essais témoignent d’un temps de latence catastrophique, de freezes à répétition et d’une application très mal goupillée.
Le scepticisme reste fort, à plus forte raison lorsque le constructeur annonce une sortie très prochaine, en février 2013.
La débacle de la marque n’a rien de nouveau. En 2009, The Summit Global Group achète les droits pour produire et distribuer les produits Polaroid, des produits dérivés surtout. Puis 2012, Polaroid et Asda trouvent un terrain d’entente, le nom Polaroid réapparaît sur une poignet de gadgets électroniques conçus de Wall-Mart. Des deals de prête-nom qui pointent du doigt un déclin, et une absence totale de projet, en contradiction avec l’époque où Polaroid rimait avec fun et innovation.
Les interrogations ne manquent pas autour de la stratégie adoptée par les dirigeants. Des initiatives comme Impossible Project montre qu’un intérêt est toujours bel et bien présent autour du format carré et de son aspect vintage (Instagram, anyone ?). L’héritage perdure mais l’entreprise vacille.
L’instant décisif fut le virage du digital. Accroché au modèle physique et ses photos instantannés, Polaroid pêche par orgueil et s’enferme dans cette idée de la photo comme un objet palpable. “Une erreur majeure » selon Gary DiCammillo, PDG de Polaroid de 1995 à 2001, qui renchérit de plus belle : “les jeunes ne veulent plus d’une copie physique”. En réaction, Polaroid annonce l’ouverture de boutiques physiques en collaboration avec Fotobar, décision qui laisse plus que perplexe.
Et pourtant, la photo instantanée reste à ce jour le moteur de l’entreprise, une part conséquente des revenus -presque contre son gré, victime de son positionnement ringard et de la grande difficulté de passer à autre chose. Sans compter qu’il est difficile d’un autre côté de faire bouger les mentalités, de changer les esprits avec un nouveau produit Polaroid suffisamment marquant pour remplacer l’ancien. La marque stagne ainsi dans l’immobilisme et se laisse porter ce simple mot fédérateur, “Polaroid”, usant de cet élan nostalgique auprès des consommateurs, sans aucun plan derrière. Jusqu’à ce qu’il n’en reste plus rien à en tirer.
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Technicolor : vers le tout technologique
Autre marque légendaire ayant du mal à négocier le virage de la modernité : ce bon vieux Technicolor, 97 ans au compteur. Le presque centenaire et son image d’indéboulonnable repose essentiellement sur son expertise dans le domaine du cinéma et la colorisation d’images. Fier d’afficher un joli CV contenant pêle-mêle le Magicien d’Oz, la franchise Harry Potter et le récent Skyfall, parmi l’immense masse de films ayant eu recours aux servicaces de la maison.
Au CES 2013, Technicolor s’attachait surtout à nous montrer un environnement familial, entièrement interactif, grâce à Qeo. Un écosystème intelligent connectant tous nos appareils entre eux, pour une utilisation centralisée, simplifiée. Système de cloud, applications, interopérabilité entre les devices… La totale. Et un mot d’ordre revenant sans cesse dans la bouche de Frederic Rose, PDG de Technicolor : la technologie. Très bien tout cela, mais quid de la photo, de la vidéo ?
Annoncé à demi-mot, The Verge note l’annonce d’un développement d’un drone qui optimise et fluidifie les mouvements de la caméra en plein enregistrement, un éditeur de vidéo très proche de l’ADN Technicolor, et M-GO, un service de vidéo à la demande semblable à Netfix.
Technicolor joue son va-tout sur une volonté affichée de rattraper son retard côté devices et connectivité. En marge, Technicolor survit aussi et surtout grâce à un impressionnant portfolio de brevets, plus de 40 000 en cours d’ici 2015, représentant 28,5% leurs revenus sur l’année 2012. L’entreprise s’adapte, continue de surfer sur son aura de vétéran de l’image en explorant le filon du « tout connecté », très moderne mais aussi très exploité. Si le tout Hollywood aime Technicolor, quid du monsieur tout le monde ?
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Kodak : un Micro 4/3 rebadgé
Côté Kodak, l’accord conclu avec JK Imaging entérine une série d’appareils (photo, caméra, projecteurs) à venir au courant de l’année 2013. Vous vous doutez désormais de la nature du partenariat : Kodak n’est qu’un joli logo sur des produits en manque de pedigree.
Le premier appareil photo de cette lignée de nouveaux produits, le S1, fut présenté récemment lors d’une conférence en Chine. Point important, il adopte le format Micro 4/3, lancé en 2008 et aujourd’hui entre autre représenté par Olympus et Panasonic. On nous promet d’ores et déjà une compatibilité wi-fi et une interface intuitive, proche de ce que propose le récent Galaxy Camera. Le produit semble cohérent, plus au point que le iM1836 de Polaroid, cité plus haut.
Crédit : The Verge
Avec ce projet, une page se tourne pour Kodak, victime comme ses deux concurrents d’une série d’échecs à répétition au cours de ces dernières années. Des déboires, la firme en a connu : banqueroutes, licenciements et la revente d’une partie de ses brevets. Kodak semble comprendre ce que Polaroid peine à intégrer : un virage digital à négocier, et une image de marque à revoir complètement, d’où la restructuration de ses activités (bye bye les pellicules argentiques) et cette alliance avec JK Imaging. Reste bien sur à voir ce que cela donne, appareil(s) en mains. Et surtout, si le nom seul de Kodak, encore très populaire aux Etats-Unis, aidera à surnager parmi une concurrence qui se fiche de la nostalgie…
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Polaroid, Technicolor, Kodak,… le chemin de croix des années 2000 semble derrière eux et, bon gré mal gré, l’adaptation au numérique et au tout connecté doit se faire. Si certaines de ces sociétés ne sont plus que des coquilles vides (Polaroid), des sources de brevets (Kodak), on peut espérer pour Technicolor une reconversion réussie, hors du cinéma.
Reste qu’il ne faudra pas se leurrer, en voyant ces produits à l’avenir : loin d’incarner des résurrections, ils ressemblent plus à des derniers espoirs.
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6 commentaires
Ajouter le vôtreJe pense que votre site contient une erreur de fond de valutation sur les politiques de Technicolor qui vise desormais au tout numérique en visant sur le connected home mais dont la recherche sur l’image numérique destinée aux clients finaux dans le grand publique.
COPIE COPIE COPIE
http://www.theverge.com/2013/1/18/3890608/as-polaroid-fades-away-technicolor-tries-to-innovate
Yes, je fait un peu de numérique et j’utilise Kodak; Ektar, PAN, TriX…
Et dire que le premier appareil numérique sort de la tête d’un ingénieur de chez Kodak!!!! la loose!!
Kodak fait toujours de l’argentique.
Raahh mais y’en a marre de ces news à deux sous sur Lense. Entre Lâm qui n’est au courant de rien et toi, c’est le ponpon.
La coquille vide Kodak, en plus de vendre ses brevets, continue à vendre quelques bobines de flims… enfin je crois… enfin j’espère…
Il y a un lien vers cet article theverge à la fin de l’article lense (cf les « via »), je ne vois pas le problème…