Dévoilé il y a tout juste quelques mois, le Huawei P30 Pro est un smartphone qui se distingue par ses trois modules photos, dont un unique équivalent à une focale 125 mm. Avec un dispositif marketing qui cible clairement les amateurs de photographies, il nous tardait de confronter ce photophone aux réalités du terrain. Voici notre verdict.
Présentation
Le Huawei P30 Pro c’est avant tout un smartphone haut de gamme. Ses caractéristiques lui confèrent une certaine assurance pour venir affronter les Samsung Galaxy S10 ou encore l’iPhone XS. On trouve en effet sous sa coque, dont le dos est en verre, un écran OLED de 6,4″ d’une définition de 2 340 x 1 080 pixels, une puce mobile Kirin 980, 8 Go de RAM, jusqu’à 256 Go de stockage, un emplacement pour carte Nano SD, un lecteur d’empreintes digitales intégré à l’écran et une batterie de 4 200 mAh.
Mais ce qui nous intéresse le plus à la rédaction c’est surtout sa partie photo. Et autant dire que Huawei n’a pas lésiné sur les moyens puisque trois capteurs photos prennent place au dos du P30 Pro avec ( les longueurs de focale sont exprimées en équivalent 24 x 36 ) un 27 mm f/1,6, un 16 mm f/2,4 et un téléobjectif périscopique 125 mm f/3,4. A cela s’ajoute un capteur Time Of Flight permettant de distinguer les différents plans de la scène photographiée pour créer des effets de profondeur de champ. Un module photo dédié aux selfies avec un capteur de 32 millions de pixels pour une ouverture f/2 prend aussi place sur la face avant.
Caractéristiques photographiques
Avec une telle armada de capteurs photographiques, c’est évidemment cette partie qui nous intéresse ici. Non seulement parce que le Huawei P30 Pro présente des caractéristiques photos surprenantes mais aussi parce qu’il est markété comme tel. A tel point qu’on se demande si finalement, on aurait pas trouvé avec lui, le point’n shoot idéal. Vous vous souvenez sans doute de cette époque photographique qui a fait la gloire des Exar RF, Nikon 35 Ti ou encore Ricoh GR. A cette époque Facebook et Instagram n’était même pas en gestation, et surtout nous n’avions pas encore un smartphone greffé aux bout des doigts.
Si nous voulions un appareil photo « bloc note » performant, il fallait se tourner vers ces légendes. Qu’est ce qui a fait la renommée de ces boîtiers ? Entre autres, leur objectif tranchant et leur compacité. Une fois l’ère du numérique arrivée à maturité, des descendants tels que la lignée des Sony RX 100 ou Ricoh GR sont arrivés. Aujourd’hui le choix est vaste avec des appareils photos très qualitatifs comme les Leica Q, Fuji X100F, Canon G7X… mais, quelque soit la taille du capteur de ces boîtiers il reste qu’emporter l’un deux signifie donc transporter un smartphone et un compact expert. Difficile de parler de double emploi tant la qualité intrinsèque des seconds l’emporte sur le premier, mais avec ses objectifs siglés Leica et une telle débauche de communication et de marketing, nous nous demandons si nous ne tenons pas avec le Huawei P30 Pro le boitier de la convergence. Celui avec lequel, au prix de quelques sacrifices photographiques, nous pourrions presque tout faire et bien entendu rester connecté, partager nos images, écrire des messages, appeler, surfer, regarder des vidéos et donc prendre des photos. Mais la qualité de ces dernières suffiraient-elles à nos exigences ?
Nous avons essentiellement basé notre test sur les trois capteurs arrières. Le premier, appelé aussi module principal est un grand angle de 27 mm équipé d’un capteur de 40 millions de pixels, doté d’une stabilisation optique et logicielle et d’une ouverture de f/1,6. Au dessus, se trouve un ultra grand-angle équivalent à un 16 mm de 20 millions de pixels, dépourvu de stabilisation mais ouvert à f/2,4. Enfin, sous le module principal le zoom x5 est un module de 8 millions de pixels sur lequel est greffé une optique de 125 mm pour une ouverture de f/3.4 mais doté d’une stabilisation hybride. Cette débauche de capteur n’est pas unique, le Galaxy S10 compte trois capteurs aussi dont un ultra-grand angle 13 mm et un zoom équivalent à un 52 mm, mais le Huawei P30 Pro est le seul photophone du marché doté d’une aussi longue focale. Prouesse technique ? Non. Le téléobjectif de 125 mm est tout simplement un objectif périscopique, installé donc perpendiculairement au dos de l’appareil. Cette architecture a l’avantage de présenter une compacité redoutable, et le fait même qu’une optique périscopique soit installée dans un smartphone est non seulement une avancée notable mais augure aussi des caractéristiques futures intéressantes avec, pourquoi pas, des zooms périscopiques qui permettraient enfin de se passer d’une multitudes de capteurs photos différents.
Au delà des caractéristiques techniques voyons ce que le Huawei P30 Pro nous réserve sur le terrain.
L’application photo du Huawei P30 Pro ne présente pas de surprises particulières. L’interface évolue peu avec sur la gauche un accès direct à l’activation du Flash, de l’iA, le style d’image et la gestion des paramètres. A droite et sous forme de menus déroulant on accède aux différents modes de prises de vue : ouverture, cliché nocturne, portrait, photo, vidéo, Pro et Plus. Ce dernier regroupe encore d’autres modes déjà vue comme le ralenti, panoramique, monochrome, light painting, super macro, etc. Soyons francs, en dépit de la multitude de fonction, dans la pratique c’est surtout le mode de prise de vue « Photo » que nous utilisons le plus. Avec ce mode on lâche prise et on laisse le smartphone tout gérer pour nous. Adieu, gestion de la profondeur de champ grâce à l’ouverture, création de filé ou même gestions des hautes sensibilités. Dans ce mode, et avec l’Intelligence Artificilielle activée, le Huawei P30 Pro est censé tout gérer.
Qualité d’image
En plein jour et dans de bonnes conditions de lumière, le module principal du Huawei P30 Pro s’en sort avec les honneurs. Et plus encore même, tant les images sont flatteuses. Les détails semblent bien présents, les déformations optiques, vignetage ou autres aberrations chromatiques oubliées. Le rendu est chaleureux avec des couleurs vives et davantage si on active l’IA. La plus part du temps, le rendu vire au HDR et les ciels et les verts sont encore plus vifs.
Malheureusement même en désactivant l’IA, il est assez difficile d’obtenir des couleurs neutres. Pour un partage d’image sur les réseaux ou sur Instagram c’est sans doute le genre de rendu que l’on cherche le plus souvent. En zoomant dans l’image, on constate que les détails sont assez lissés.
Avec le module de 40 millions de pixels, la netteté s’améliore sans que l’on ait nécessairement une sensation de piqué exagérée. Le Raw permet encore de récupérer du détail mais dans ce cas vignettage et aberrations chromatiques sont de la partie. Pire, même à 50 ISO on peut observer du bruit sur l’image. Et c’est là que l’on se rend compte de la puissance du traitement de Huawei. En passant en sur une définition de 10 millions de pixels, non seulement on accède aux autres modules ultra grand-angle et zoom ( ce qui n’est pas possible en shootant en 40 millions de pixels ), mais en plus le rendu est directement exploitable.
En ultra grand angle, la netteté diminue sur les bords mais encore une fois l’ensemble est flatteur, contrasté et les couleurs sont saturées. Pour le téléobjectif, le rendu est plus doux mais le lissage efface les détails les plus fins détails. En zoomant dans l’image nous avons même l’impression d’une peinture avec des contours accentués. Globalement, c’est le reproche que l’on fait au Huawei P30 Pro. De prime à bord les images présentent bien, avec un bon contraste, une colorimétrie, certes exagérée, mais globalement flatteuse. Cependant en zoomant dans l’image on se rend compte à quel point les plus fins détails sont lissés. C’est avec le module principale que l’acutance est la plus élevée. Le téléobjectif, bien qu’unique en son genre, offre des résultats assez décevants.
Cette déception se trouve aussi au niveau de la gestion de la profondeur de champ. Avec ses tous petits capteurs le Huawei P30 Pro ne peut pas faire de miracle et doit s’appuyer sur ses algorithmes et son capteur Time Of Fligtht. Celui-ci permet de mesurer l’étagement des plans, et indique donc au smartphone ce qui doit être net et flou. Le rendu est bien mieux que ce que l’on a vu jusqu’à présent. Par rapport à ses prédécesseurs, les transitions net-flou sont un peu plus progressives. Malheureusement, on sent encore à quel point le rendu est artificielle avec une découpe très nette entre le sujet et l’arrière plan, sans parler des erreurs récurrentes dans le mode « ouverture ». Dans le mode « photo » les erreurs ne sont pas systématiques, et si on se contente de regarder l’image sur le téléphone sans zoomer l’effet est plaisant. En réalité, nous encore sommes loin de ce que peut offrir un capteur plus grand.
L’autofocus en revanche ne démérite pas, et fait tout ce qu’il peut pour suivre le sujet. Globalement la latence au déclenchement, avec le module principale est imperceptible. Par contre, avec l’ultra grand angle et le zoom, on sent que l’appareil mouline et est victime d’erreur de mise au point par moment. Cependant, l’autofocus nous a positivement surpris dans certaines condition, notamment avec un deux roues se déplaçant horizontalement rapidement. Il a été capable de le suivre, et de proposer automatiquement des filés. Là encore le rendu est immédiatement partageable.
Pour finir, un mot en ce qui concerne la gestion des hautes sensibilités. Cette dernière a un fonctionnement assez étrange. Avec la définition native, il n’est pas possible de dépasser les 6 400 ISO, que ce soit en Jpeg ou en Raw. En passant en 10 millions de pixels, il est possible d’atteindre les 409 600 ISO, mais le temps de pose se bloque du coup sur 0,5 s. Enfin, en mode Cliché Nocturne ( mode qui propose l’assemblage de plusieurs vues prises entre 1/4s et 32s ) la sensibilité ne peut pas dépasser les 1 600 ISO. La logique est donc assez confuse, et en réalité il vaut mieux laisser faire le boitier pour nous, soit en restant en mode automatique soit en basculant en mode Cliché Nocturne. Les résultats sont bluffants ! À main levé, dans la pénombre, il est non seulement possible d’obtenir des images nettes, mais surtout bien exposées. Là aussi il ne faudra pas trop zoomer dans l’image car les détails disparaissent pour laisser place à des aplats aux contours accentués.
Les + :
- Design
- Réactivité de l’application
- Simplicité d’usage
- Polyvalence par rapport à un smartphone classique
- Mode tout auto souvent pertinent
- Images flatteuses
- Mode cliché nocturne bluffant
Les – :
- Qualité d’image une fois observée sur écran d’ordinateur
- Lissage excessif
- Pas d’accès à l’ultra grand-angle lorsque 40 Mpix activés
- Effet de profondeur de champ encore artificiel
- Téléobjectif pas si lumineux
- Prix
Verdict
Le Huawei P30 Pro est-il oui ou non le digne successeur des compacts experts ? Non, pas encore, mais cela ne l’empêche pas d’être l’un des meilleurs photophones disponibles sur le marché, et du même coup un très bon bloc note. En dépit des progrès, et même des prouesses qu’il réalise au niveau de la qualité d’image, nous devons nous rendre à l’évidence : nous sommes encore très loin de ce que peut offrir un compact expert qui a même plusieurs années comme un Sony RX 100 ou un Canon G7X. Si les images que le Huawei P30 Pro présente sur son écran paraissent flatteuses, une fois sur un écran d’ordinateur et observées plus finement on constate combien les algorithmes de Huawei lisse les détails tout en accentuant les contours. L’image est contrasté et flatteuse, mais en réalité les plus fins détails tendent à être trop lissés. Enfin, des incohérences restent à souligner. Pourquoi en activant la définition native à 40 millions de pixels, il n’est pas possible d’accéder au module ultra grand-angle et au téléobjectif ? De la même façon, pourquoi en gestion manuelle de la sensibilité au delà de 6 400 ISO, il est impossible possible de gérer manuellement le temps de pose.
Le Huawei P30 Pro nous amène donc à un constat : il est inutile de chercher à débrayer ses modes et de vouloir s’aventurer dans la multitude d’option proposées. Il faut accepter de le laisser faire et passer en mode automatique « Photo ». Là, étonnamment, le smartphone propose des résultats que nous peinions à avoir en mode manuel, et ajuste automatiquement profondeur de champ, temps de pose et exposition. La plupart du temps les rendus sont exagérés et les couleurs trop vives. Le smartphone propose un rendu flatteur à mène de satisfaire la plupart de usages. Alors, sans complexe, on se prend au jeu et on se plait à jouer tantôt avec le grand angle, tantôt avec le zoom d’une simple tape sur l’écran. Le Huawei P30 Pro est un formidable couteau suisse de l’image tant qu’il s’agit de rester dans l’écosystème propre au smartphone : publication sur les réseaux, partage entre amis, et surtout consultations des images sur l’écran du smartphone. En revanche la qualité d’image est encore en deçà de nos attentes si on cherche vraiment du détail ou à définitivement se passer de son compact expert.
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