Tim Flach est l’un des plus célèbres photographes de nature contemporains. Ses portraits d’animaux pris « comme des humains » ont fait le tour du monde. Son seul défi : montrer qu’il existe un langage commun entre l’homme et l’animal, entre l’homme et la nature. Susciter l’empathie nécessaire pour que l’humanité se sente enfin concernée par les sorts de la planète. Nous lui avons posé quelques questions. (Photo d’ouverture : © Tim Flach / Lemur Leaf Frog)
Voyageur aguerri, reporter du terrain, sensible aux causes environnementales, Tim Flach est l’un des noms les plus reconnus de la photographie contemporaine. Ses portraits d’animaux ont fait le tour du monde et ont été l’objet de plusieurs livres, dont le plus connu, More than Humans, nous présente la faune terrestre sous un jour nouveau.
Photographiés comme des véritables personnages, ces animaux dévoilent une sensibilité et une délicatesse inouïes, prouvant, si jamais le doute pouvait encore persister, que l’empathie n’est pas que chose humaine. Dans un deuxième opus aussi bouleversant que nécessaire, Endangered, le reporter britannique met à l’honneur des animaux en voie de disparition. Une dernière tentative, animée par un espoir jamais terni, de préserver une planète de laquelle l’homme s’est tout simplement déconnecté.
« J’ai commencé à photographier des animaux pour apporter une contribution au débat sur l’environnement » dévoile le photographe. La première fois que Tim Flach a immortalisé des animaux c’était au zoo de Londres. Il s’aperçoit alors que quelque chose se passe dans la rencontre entre l’homme et l’animal : deux sensibilités se rapprochent, jusqu’à pouvoir se comprendre, malgré l’absence de langage commun. C’est cette zone d’empathie entre espèces différentes et pourtant vivant sur une même planète qui fascine le photographe.
Une connexion possible que les hommes ont oublié, de plus en plus, pour arriver à conformer le territoire à leurs besoin. Comment l’homme façonne la nature à sa faveur ? Pourquoi le fait-il ? Ne se rend-il pas compte du danger auquel il s’est exposé du moment qu’il a arrêté cette connexion avec les autres êtres vivants ? Enfermé dans une bulle technologique, l’homme a tourné le dos à son environnement. « La photographie est un moyen de renseigner les gens mais aussi de les émouvoir. L’art travaille sur une partie du cerveau inconsciente, spontanée, abstraite, mais qui paradoxalement se rapproche plus du réel que la partie rationnelle. » Est-il plus pragmatique de continuer à pousser la technologie, ignares des limites que la nature impose, ou bien ressentir une empathie envers le vivant qui nous empêcherait de le détruire, à la lumière des dangers désormais évidents ?
Tirer le portrait d’animaux que l’homme est en train de condamner. Tell est la démarche de Tim Flach, qui nourrit l’espoir de changer les mentalités, de sensibiliser, de donner une vision de la nature le plus possible proche de l’homme pour qu’il comprenne enfin qu’il en fait partie aussi. « Les animaux ont une personnalité. La comprendre pourrait nous aider à éviter le carnage » explique-t-il. « Par exemple, on ne doit jamais photographier un oiseaux par terre. Les oiseaux ne se sentent pas bien par terre. Ils préfèrent être en hauteur. A ce moment-là, ils se laissent approcher. Quand je photographie un animal, je me demande toujours à quel point il peut être sensible. Comment faire pour adopter son mode de communication pour ne pas le mettre sous pression ».
« Les grands singes d’Asie, comme le singe au nez retroussé, mais aussi le panda par exemple, sont des symboles de tout un monde. Créer une galerie de portraits d’animaux à travers le globe, permet de les connecter tous et de les faire découvrir au grand public qui peut ainsi s’en rapprocher » dit-il.
L’ère digitale a dramatiquement éloigné l’homme de la nature. Au fur et à mesure que le progrès technologique avance, les humains perdent tout contact avec le monde environnant, préférant habiter dans des grandes villes, devant des ordinateurs. Rien ne semble plus les relier au reste. La photo est aussi un merveilleux moyen, donc, de faire dialoguer homme et nature par le biais d’un écran. Sur Instagram ou sur un site Internet.
« Je ne peux pas savoir si l’homme réussira son plus grand défi : celui de poursuivre son évolution tout en restant humain. A rester proche du réel tout en bâtissant un monde virtuel. Mais je sais qu’il y a un espoir. Et que tant qu’il y a l’espoir qui pousse au combat, nous pourrons encore changer des choses ».
Source : Interview
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